PÈLERINAGE Á TIPASA

On m’excusera de romancer au moins ce point. Je vais l’appeler Ahmed parce qu’au moment où j’écris, sept ans après, j’ai perdu la mémoire de son véritable prénom.

Le jour de mon arrivée à Alger, l’hôtelier m’a mis en contact avec Ahmed, la cinquantaine bien tassée, « guide » à ses heures c’est-à-dire probable chômeur arrondissant ses fins de mois en baladant les rares touristes qui peuvent se présenter. Nous nous sommes mis d’accord pour aller le lendemain à Tipasa. J’avais en tête la couverture défraîchie de mon édition Folio des Noces de Camus et surtout les pages lyriques de ce très beau texte, cet enchantement tragique de l’adolescence. Nous avons pris un bus, je crois, et j’ai été déçu que la route s’éloigne du bord de mer. Ahmed me parlait de la guerre, des attentats du GIA, une folie qu’il sentait encore présente, en sourdine au moment où nous roulions vers Tipasa mais prête à se rallumer très vite, n’importe quand.

Arrivé sur place, j’ai enfin « retrouvé » ce que j’attendais : les ruines donnant sur la Méditerranée, les dalles disjointes, les colonnades et la végétation sèche ; il ne manquait que le soleil. Cela m’a fait penser à Kerkouane en Tunisie, un site confidentiel du Cap Bon, non loin de Al Haouaria. Plus tard, j’ai aussi aimé le petit musée au centre ville. Non que je m’intéresse particulièrement aux pierres mais l’atmosphère tranquille de ces lieux me touche. Les salles sont quasiment vides, la poussière est partout et les explications toujours assommantes, parfois illisibles. Il y aurait quelque chose à faire sur ces musées sans le sou (comme celui de Gaoua par exemple) : un documentaire, un beau livre de photos, une biographie du mécène.

Pour en revenir à la raison de mon passage à Tipasa, disons que je voyage très souvent par les livres et puis je vérifie. J’en ai parlé dans mon article au sujet du Bombay de Tabucchi : « Guide des parcours illogiques » (https://tilltheendproductions.com/2015/06/18/guide-des-parcours-illogiques/)

La photo du bas, c’est moi qui l’ai prise. C’est à peu près la vue de la couverture de mon bouquin. Les photos où on me voit ont dû être prise par Ahmed. Quand je les ai découvertes, j’ai eu quelques difficultés à me reconnaître. Je suis plus jeune et plus vieux à la fois.

Maigre.

Stigmatisé.

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