
Encore un autre jour, à Jakarta, Indonésie, je me suis posé la question suivante : comment organiser le chaos ? Bien sûr, ce n’était que le résultat d’une approche superficielle, le maigre et pourtant envahissant pécule de préjugés et d’ignorances d’un voyageur occidental, mais admettons tout de même que la capitale indonésienne n’apparaît pas seulement comme un vaste bordel, elle l’est. Je naviguais à vue près de la gare de Jakarta Kota, dans le centre, et me venaient des mots : cloaque, salmigondis, pandémonium, Shéol, cul de basse-fosse, bolge, Tartare, etc. Je me souviens d’avoir été frappé par l’ironie tragique d’une triple poubelle de tri (verte, orange, rouge), vide et dérisoire au-dessus des caniveaux débordants. Et je pourrais ainsi poursuivre, sur de belles lignes épiques, le nouvel Enfer de Dante, excusez du peu. On me l’avait dit, d’ailleurs, Jakarta, c’est l’enfer, le chaos, oui.
« Et pourtant, elle tourne », cette ville, comme aurait dit l’autre. On s’y débrouille, on y travaille, certes pas tout le monde mais on y gagne de l’argent, on y joue aux échecs ou au billard, on y porte de grosses bagouzes. Je crois finalement que l’organisation du chaos était une question trop grande pour moi. J’ai juste l’impression aujourd’hui que le chaos, on s’y fait, c’est une question d’habitude, de fatalisme ou de résistance.
















