
Trente deux ans se sont passés avant que je retourne au Ghana et cinq pour que je mette la dernière main au film que j’ai réalisé au sujet de cette « retrouvaille ». J’ai déjà indiqué (ICI) la rareté et la justesse de ce terme au singulier. Et tout le film – à ce point intime qu’il pourra paraître too much, romanesque – est dans la singularité d’une expérience majeure dont l’empreinte n’a jamais pu s’effacer. Une vie durant, ces deux années passées au Ghana auront nourri le domaine intérieur, les tréfonds d’un imaginaire purement subjectif, avec son lot de scories ou de merveilles. Une affaire de temps et d’espace : la confrontation entre un monde existant à une époque donnée, le mois d’août 2017, et l’espace perdu du passé, de ses recompositions rêvées ; une recherche de ce que le temps avait fait à ces lieux, des traces qui, comme une cicatrice, resteraient peut-être de leur âge révolu.
Le film La vallée du chant du monde était dédié à ma mère. Ghana memories est dédié à mon père. De lui qui, comme beaucoup, ne connaissait de l’Afrique que les chromos de la réclame ou des manuels scolaires d’avant guerre était venue la première idée de ce retour. On l’aperçoit avec ma mère au détour d’une scène tournée en super 8 sur un chemin de brousse. Je dois à leur voyage (au risque qu’ils avaient pris de l’entreprendre) la teneur de quelques souvenirs précieux, tenaces, d’un partage entre un fils et son père. En pensant à lui j’ai donc repris la route, mis des mots et des images sur une affaire singulière.